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Les modes alternatifs de résolution des litiges commerciaux : arbitrage, médiation et conciliation
Les litiges commerciaux sont devenus une réalité incontournable pour de nombreuses entreprises. Face à l’engorgement des tribunaux, aux coûts élevés et aux délais souvent excessifs des procédures judiciaires traditionnelles, les modes alternatifs de résolution des litiges se sont progressivement imposés comme des solutions efficaces et pragmatiques. Ces méthodes, communément désignées sous l’acronyme MARC (Modes Alternatifs de Règlement des Conflits) offrent aux entreprises des voies différentes pour résoudre leurs différends commerciaux.
L’arbitrage, la médiation et la conciliation constituent les trois principaux modes alternatifs de résolution des litiges commerciaux. Chacun présente des caractéristiques, avantages et limites spécifiques qu’il convient de bien comprendre pour faire un choix éclairé. Cet article propose un examen approfondi de ces trois méthodes, leur cadre juridique en France, ainsi que des conseils pratiques pour leur mise en œuvre.
Qu’est-ce que les modes alternatifs de résolution des litiges commerciaux ?
Les modes alternatifs de résolution des litiges désignent l’ensemble des procédés qui permettent de régler un conflit sans recourir au juge étatique. Ils s’inscrivent dans une démarche de résolution amiable des conflits, privilégiant le dialogue et la recherche de solutions mutuellement acceptables.
En France, ces modes alternatifs ont connu un développement significatif ces dernières années. Le Code de procédure civile encourage désormais explicitement le recours à ces méthodes avant toute saisine d’un tribunal.
Les modes alternatifs de résolution des litiges présentent plusieurs avantages communs :
- Rapidité de la procédure par rapport aux tribunaux traditionnels
- Coûts généralement moins élevés que les procédures judiciaires
- Confidentialité des échanges et des résultats
- Flexibilité dans l’organisation et le déroulement des procédures
- Préservation des relations commerciales entre les parties
- Expertise des intervenants dans le domaine concerné
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L’arbitrage commercial : une justice privée
L’arbitrage commercial est un mode de résolution des litiges par lequel les parties confient à un ou plusieurs arbitres, choisis par elles ou désignés selon des modalités qu’elles déterminent, la mission de trancher leur différend par une décision qui s’impose à elles. Il s’agit d’une véritable justice privée, alternative à la justice étatique.
En France, l’arbitrage commercial est régi par les articles 1442 à 1527 du Code de procédure civile. Il peut être ad hoc (organisé directement par les parties) ou institutionnel (administré par un centre d’arbitrage comme la Chambre de Commerce Internationale de Paris).
Procédure d’arbitrage commercial
La procédure d’arbitrage commercial se déroule généralement selon les étapes suivantes :
- Convention d’arbitrage : Les parties s’accordent pour soumettre leur litige à l’arbitrage, soit par une clause compromissoire insérée dans leur contrat initial, soit par un compromis d’arbitrage conclu après la naissance du litige.
- Constitution du tribunal arbitral : Les parties désignent un ou plusieurs arbitres (généralement un ou trois) qui formeront le tribunal arbitral.
- Procédure arbitrale : Le tribunal arbitral organise la procédure en fixant un calendrier, en recevant les mémoires des parties et en tenant des audiences.
- Sentence arbitrale : Au terme de la procédure, le tribunal arbitral rend une sentence qui s’impose aux parties et qui a l’autorité de la chose jugée.
- Exécution de la sentence : La sentence peut être exécutée volontairement ou faire l’objet d’une procédure d’exequatur pour obtenir force exécutoire.
Avantages et limites de l’arbitrage commercial
L’arbitrage commercial présente des avantages spécifiques :
- Choix des arbitres en fonction de leur expertise technique ou sectorielle
- Procédure généralement plus rapide que devant les juridictions étatiques
- Confidentialité totale des débats et de la sentence
- Reconnaissance internationale des sentences arbitrales (Convention de New York de 1958)
- Flexibilité procédurale adaptée aux besoins des parties
Cependant, l’arbitrage commercial comporte aussi certaines limites :
- Coûts parfois élevés (honoraires des arbitres, frais administratifs)
- Absence de recours, sauf en cas de violation de l’ordre public
- Difficulté d’obtenir des mesures provisoires ou conservatoires
- Risque de déséquilibre entre parties de taille différente

La médiation commerciale : une solution négociée
La médiation commerciale est un processus structuré par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur. Contrairement à l’arbitre, le médiateur n’a pas le pouvoir d’imposer une solution aux parties.
En France, la médiation commerciale est encadrée par les articles 131-1 à 131-15 du Code de procédure civile et par l’ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 qui a transposé la directive européenne 2008/52/CE.
Déroulement de la médiation commerciale
Le processus de médiation commerciale se déroule généralement comme suit :
- Désignation du médiateur : Les parties choisissent ensemble un médiateur indépendant et impartial.
- Réunion d’information : Le médiateur explique aux parties le processus, son rôle et les règles de confidentialité.
- Exposé des positions : Chaque partie présente sa vision du litige et ses attentes.
- Identification des intérêts : Le médiateur aide les parties à identifier leurs intérêts réels au-delà des positions exprimées.
- Recherche de solutions : Les parties, avec l’aide du médiateur, explorent différentes options de règlement.
- Accord de médiation : Si un accord est trouvé, il est formalisé par écrit et peut être homologué par un juge pour lui donner force exécutoire.
Avantages et limites de la médiation commerciale
La médiation commerciale offre plusieurs avantages distinctifs :
- Contrôle total des parties sur l’issue du processus
- Préservation optimale des relations d’affaires
- Recherche de solutions créatives et sur mesure
- Coûts généralement modérés
- Confidentialité absolue des échanges
- Rapidité du processus (quelques semaines à quelques mois)
Ses limites incluent :
- Absence de garantie d’aboutir à un accord
- Nécessité d’une volonté réelle des parties de coopérer
- Difficulté en cas de fort déséquilibre de pouvoir entre les parties
- Absence de force contraignante de l’accord sans homologation
La conciliation des litiges commerciaux : une approche pragmatique
La conciliation des litiges est un processus par lequel un tiers impartial, le conciliateur, aide les parties à trouver une solution à leur différend. Contrairement au médiateur qui facilite principalement la communication, le conciliateur peut proposer activement des solutions aux parties.
En France, la conciliation est régie par les articles 127 à 131 du Code de procédure civile. Elle peut être judiciaire (ordonnée par un juge) ou conventionnelle (à l’initiative des parties).
Procédure de conciliation des litiges
La conciliation se déroule généralement selon les étapes suivantes :
- Désignation du conciliateur : Soit par le juge (conciliation judiciaire), soit par les parties (conciliation conventionnelle).
- Rencontres de conciliation : Le conciliateur reçoit les parties, ensemble ou séparément, pour comprendre le litige.
- Proposition de solutions : Le conciliateur suggère des pistes de règlement aux parties.
- Accord de conciliation : Si les parties parviennent à un accord, celui-ci est formalisé par écrit et peut être homologué par un juge.
Avantages et limites de la conciliation
Les avantages spécifiques de la conciliation des litiges incluent :
- Gratuité de la procédure (pour la conciliation judiciaire)
- Rôle actif du conciliateur dans la recherche de solutions
- Simplicité et accessibilité de la démarche
- Rapidité du processus (souvent quelques semaines)
- Possibilité d’homologation judiciaire de l’accord
Ses limites comprennent :
- Compétence variable des conciliateurs selon les domaines
- Moindre formalisme pouvant affecter la qualité des accords
- Efficacité limitée pour les litiges très complexes
- Absence de force contraignante sans homologation
Comparaison des modes alternatifs de résolution des litiges
Pour aider à choisir le mode de résolution le plus adapté à chaque situation, voici un tableau comparatif des trois principales méthodes :
Critère | Arbitrage commercial | Médiation commerciale | Conciliation des litiges |
---|---|---|---|
Pouvoir du tiers | Décision imposée | Facilitation uniquement | Proposition de solutions |
Formalisme | Élevé | Moyen | Faible |
Coût | Élevé | Moyen | Faible ou gratuit |
Durée moyenne | 6 à 18 mois | 1 à 3 mois | 1 à 2 mois |
Force de la décision | Exécutoire | Accord contractuel | Accord contractuel |
Confidentialité | Totale | Totale | Variable |
Expertise requise | Spécifique | Processuelle | Générale |
Préservation relation | Moyenne | Très bonne | Bonne |
Recours possibles | Très limités | Non applicable | Non applicable |